Compte rendu de l’audience du 10/11 à la sous-préfecture de Mantes la Jolie

Dans le contexte de la journée de mobilisation pour obtenir un renforcement du protocole sanitaire, une délégation a été reçue par le sous-préfet. Cette délégation était composée de représentants d’organisations syndicales (FSU- CGT éduc’action -Sud éducation) et de fédérations de parents d’élèves (FCPE). Une trentaine de collègues et de parents étaient présents devant la sous-préfecture, représentatifs des établissements en lutte dans le Mantois (Jules Ferry, la Vaucouleurs, George Sand).

– En introduction, la secrétaire départementale de la FSU 78 et du CHSCT-D Evelyne D. a rappelé la gravité de la situation sanitaire alors même que le protocole proposé par le Ministre de l’éducation reste très insuffisant : absence de mesure contraignante concernant la distanciation physique, renvoi de la gestion sanitaire au local alors que les collectivités territoriales ne sont pas en mesure d’assurer la montée en charge de la fréquence des désinfections (pas de personnel en plus, mais plutôt du personnel en moins avec des arrêts de travail qui se multiplient). Par ailleurs, la colère des enseignant.es est renforcée depuis le lundi 2 novembre, avec l’impossible hommage à leur collègue Samuel Paty puisque le ministre a annulé au dernier moment la possibilité de banaliser du temps pour préparer pédagogiquement le retour des élèves dans ce contexte si particulier. C’est bien cette situation explosive dans les établissements qui participe au mal être des personnels qui se disent à bout comme en témoignent les nombreux arrêts maladie imputables au service et droit de retrait qui se sont exprimés, expliquant aussi sans doute la très forte mobilisation des enseignant.es dans la Mantois depuis le lundi 2 novembre.

– François H. poursuit pour le SNES-FSU sur la situation des lycées. Si ceux-ci ont obtenu la possibilité de dédoubler les effectifs, c’est bien parce qu’il y a eu une très forte mobilisation des enseignants puis des élèves pour faire pression sur la Direction Académique des Yvelines. Le mouvement a commencé le lundi 2 novembre, mais il a fallu attendre le jeudi 5 novembre pour obtenir l’accord de principe pour organiser les dédoublements. Il est regrettable que l’institution ait joué le pourrissement dans et aux abords des établissements, alors que des solutions étaient applicables dès la rentrée. Cette absence de réponse a généré des tensions avec la police qui auraient pu être largement évitées. Les collègues grévistes, ou en droit de retrait, n’ont cessé de travailler sur le projet pédagogique, la préparation de l’hommage à Samuel Paty. Ils ont aussi participé à l’apaisement des tensions aux abords des établissements. Pour cette raison, la FSU demande solennellement qu’aucune journée de salaire ne soit retirée aux collègues qui se sont mobilisés dans l’intérêt des élèves et du service public d’éducation. Enfin, si les dédoublements sont possibles dans les lycées, M. Hébert met en garde contre la tentation que pourraient avoir certains établissements de ne pas les appliquer de façon à garantir à leurs élèves un maximum d’heures de cours en dépit de la pandémie. Cela représenterait une rupture d’égalité et un risque sanitaire accru. Il est essentiel d’avoir un cadre national contraignant pour tous les établissements.

– Jacqueline T. s’est exprimée au nom de Sud éducation pour les collèges. Contrairement aux lycées, ceux-ci n’ont pas encore obtenu les dédoublements malgré la très forte mobilisation dans certains établissements du Mantois. En premier lieu, elle rappelle au sous-préfet que si les collègues sont fortement mobilisés, c’est justement pour éviter une fermeture totale des établissements. Le protocole soit disant renforcé ne permet en aucun cas de ralentir les contaminations dans les collèges, car la distanciation physique est impossible à garantir dans les classes, les couloirs et la demi-pension. Elle informe le sous-préfet que l’entreprise C’midy n’assure pas, dans de trop nombreux établissements, la désinfection pourtant exigée. Photos à l’appui, elle démontre une gestion calamiteuse de l’entretien et de la restauration. Elle rappelle la pression très forte qui pèse sur les agents du département qui travaillent pour C’Midy dans les collèges. Il est urgent de renforcer les équipes. Concernant les revendications des collègues, elle explique que les dédoublements qui ont été accordés en lycée sont également une nécessité dans les collèges. Les masques doivent être fournis en nombre suffisant pour les personnels et les élèves.

– Clémence A. prend ensuite la parole pour le premier degré au nom de la CGT éduc’action. Elle décrit au sous-préfet une situation extrêmement tendue dans les écoles : les locaux sont trop petits pour éviter le brassage des élèves et des enseignants, les élèves ne parviennent pas à garder le masque qu’ils touchent constamment, les mairies sont dépassées et ne parviennent pas, dans bien des cas, à assurer la désinfection des locaux. Elle rappelle que les masques n’ont pas été fournis en nombre suffisant pour les enseignants et les élèves, et que de nombreuses familles ont dû, alors que le confinement avait été prononcé, se précipiter dans les grandes surfaces pour s’assurer que leur enfant puisse avoir un masque à la rentrée. Les masques en tissu fournis par l’éducation nationale sont trop grand pour de jeunes élèves, et rien ne garanti qu’ils soient régulièrement lavés. Elle dénonce ensuite les pressions exercées par les inspections de circonscriptions sur les collègues qui refusent d’appliquer des consignes ministérielles qui leurs semblent totalement contradictoires avec le contexte d’urgence sanitaire. Ainsi, des collègues ont été menacés de retrait sur salaire parce qu’ils ont refusé d’amener leurs élèves à la piscine alors même que celles-ci ferment pour le public. L’absence de personnels remplaçant favorise le brassage des élèves et leur proximité dans une situation où les arrêts maladie et mise en isolement des personnels se multiplient. Le décalage entre la doctrine ministérielle et le terrain est si grand que les collègues sont en grande souffrance. Elle plaide pour un dédoublement des effectifs avec la mise en place d’une alternance matin/après-midi. Cette organisation permettrait d’assurer un lien quotidien avec l’école. Il faut impérativement éviter un confinement total et la mise en place du 100 % distanciel. Mais avec l’accélération de l’épidémie, n’est-il pas déjà trop tard ?

– Guilaine L. pour la FCPE premier degré intervient pour expliquer les craintes des parents. D’une part, ils ont peur que leurs enfants soient des vecteurs de contamination à partir du moment où le protocole ministériel ne permet pas de garantir la distanciation physique. D’autre part, elle exprime le risque d’une fermeture des écoles qui ne ferait qu’accentuer la fracture scolaire entre les élèves. Selon cette représentante des parents, des solutions existent et doivent être appliquées dès à présent : recrutement de nouveaux enseignants (comme en Italie) en puisant dans le vivier de la liste complémentaire, réquisition immédiate de locaux appartenant aux collectivités afin de permettre d’accueillir les élèves dans le respect de la distanciation physique. Elle insiste sur le nécessaire partenariat avec les municipalités pour permettre d’assurer au maximum la prise en charge des élèves sur la journée (articulation entre demi-groupes à l’école et activités péri-scolaires en faisant appel à des éducateurs, associations…).

– Pour conclure, Fadila G. prend la parole pour la FCPE et la PEEP au sujet des collèges et des lycées. Elle souligne l’importance du travail des fédérations de parents avec les enseignants pour mettre en place des mesures sanitaires réellement efficaces dans les établissements. C’est notamment le cas du travail qui a été mené au lycée Saint-Exupéry de Mantes-la-Jolie depuis la rentrée du 2 novembre. Elle explique que de nombreuses remontées de parents parviennent aux fédérations faisant état de la grande détresse psychologique de leurs enfants dans le contexte actuel : cette détresse est due à la crainte des enfants d’être contaminés et de ramener le virus à la maison. Mais elle est aussi due à l’absence de perspective pour leur scolarité et à la peur d’un éventuel reconfinement.

Après ce tour de table, monsieur le sous-préfet a assuré qu’il ferait remonter les informations dont nous lui avons fait part. Il est revenu sur quelques points de nos interventions :

– Il semble tout à fait concevoir que les dédoublements soient nécessaires, mais il explique que l’accélération de la pandémie a surpris tout le monde, et qu’il faut du temps pour mettre en place les dispositifs pédagogiques permettant une réelle distanciation physique. Il estime que le travail actuel doit permettre d’ici le mois de janvier un dispositif pédagogique et sanitaire véritablement renforcé. Nous lui avons rétorqué que selon nous, il était hors de question d’attendre le mois de janvier. C’est maintenant que les collègues et parents sont mobilisés, et c’est demain que nous voulons des dédoublements. Car si nous restons en l’état, tout nous laisse à craindre que nos établissements scolaires pourraient être totalement fermés en janvier.

– Il revient brièvement sur la gestion de l’ordre public aux abords des lycées la semaine dernière. Pour lui, l’usage de la violence pour obtenir satisfaction est intolérable et inacceptable. Il rappelle que 4 interpellations ont eu lieu suite aux dégradations commises. Nous lui rappelons que nous n’avons jamais justifié la violence dans nos interventions, tout en insistant une nouvelle fois sur le caractère pacifique des blocus organisé par les élèves (du moins constaté devant le lycée Saint-Exupéry) et le rôle de la communauté éducative (parents et enseignants) devant les établissements pour faire baisser la tension alors que la police usait de lacrymo et grenades de désencerclement.

– Concernant C’Midy, il s’est montré particulièrement attentif à la description faite de la situation dans les collèges et a assuré qu’il ferait remonter les informations.

L’audience a duré 45 minutes. À l’issue de celle-ci, les membres de la délégation ont fait un résumé de ce qui avait été dit aux personnes rassemblées devant la préfecture. Nous avons insisté sur la nécessité de rester unis dans nos revendications, de la primaire à l’université. Ce qui passe par des organisations d’accueil différentes en fonction des niveaux de classe mais dans un cadre qui doit rester national afin de garantir l’équité pour tous.

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